10 septembre 2019
Par Michelle Camara
Il y a quelques semaines de cela, j’ai décidé de Big choper. Je vous explique en quelques lignes comment j’en suis arrivée là.
Que celle qui n’a jamais été écœurée par son afro 4C me jette le premier peigne!
Quand vous vous faite tresser depuis déjà 4 heures et qu’il reste encore une sacrée touffe à natter. Ou bien quand vous les démêlez religieusement et précautionneusement mais qu’ils s’entêtent à s’emmêler dans la minute qui suit. Ou encore, quand vous avez cédé à la tentation du lissage et qu’ils vous le font payer au centuple en se cassant, laissant sur votre tête une sorte d’araignée au corps nuageux et au milles pattes affinées…Avouez, vous aussi vous avez voulu tout raser!
Une relation aux cheveux limite malsaine
La femme et sa chevelure c’est toute une histoire. La femme noire et son afro en est une toute autre! Non cet article n’en est pas un énième qui va vous dicter les règles pour être une bonne nappy, ou vous moraliser parce que vous lissez ou tressez vos cheveux. C’est un partage d’expérience un témoignage personnel qui résulte d’un long dialogue interne et qui peut-être vous conduira à mener votre propre réflexion.
Après plus de 10 ans de réflexion, j’ai « big choppé»!
Je fais partie de ces jeunes filles afropéennes qui se font défriser les cheveux depuis leur toute petite enfance. Je n’ai qu’un vague souvenir du plaisir que je ressentais à avoir les cheveux défrisés, mais je sais que jusqu’à l’adolescence, pour moi et autour de mois, beauté et cheveux longs et lisses étaient souvent liés dans une étrange relation de cause à effet. Je ne me sentais jamais aussi belle qu’une fois tressée, tissée ou encore mieux CHEVEUX LISSÉS. D’ailleurs lorsque je portais mes cheveux naturels pendant un certain temps, il n’était pas rare d’entendre un cousin ou une tantie me demander pourquoi je n’étais pas « COIFFÉE ». Ajoutez à cela les canons de beauté occidentaux qui ne laissent pas de place pour le cheveux Afro et le manque de confiance inhérent à l’adolescence. Imaginez maintenant la relation aux cheveux de la jeune fille que j’étais…. D’ailleurs, quand j’ai lancé à l’âge de 14 ans que je me verrai bien avec les cheveux courts curly à la façon de Laura Winslow dans La vie de Famille, je me souviens des sourires, disons-le, un peu moqueur de copines et proches. J’avais alors précisé « non mais, seulement quand je serai plus grande! » L’idée ne m’a jamais quitté. Elle est revenue régulièrement, notamment quand je me sentais
impuissante face à ma crinière indomptable ou brisé par les mauvais traitement… Mais ces derniers mois j’ai vu le big chop s’imposé à moi comme une réelle envie et non plus comme un choix par dépit.
Accepter sa nature de cheveux et vivre avec!
Comme la parfaite petite afropéenne des temps modernes, je connais le mouvement nappy et suis les débats sur les cheveux afro : « Les femmes qui ne portent pas leur cheveux naturel ont-elles honte de leur cheveux »; « L’afro est-elle une coiffure professionnelle ? »; « le défrisage des cheveux crépus est-il un signe de colonisation de l’esprit ? » De manière générale je trouve ces débats très polarisés. Alors j’ai décidé de faire mon propre cheminement. Voici quelques questions que je me suis posées :
Ai-je honte de mes cheveux?
Quand ils sont en bonne santé, bien sûre que non! Mais ce n’était plus le cas. Après 4 ans sans aucune sorte de lissage j’ai à nouveau sombré dans le Bôtox et même tenté le fameux lissage brésilien. Il fut un temps où ces produits m’ont comblé, mais ce n’était pas le cas lors de mes derniers essaies…Je n’avais plus ni afro ni cheveux lisses, seulement la tête en chantier!
Pourquoi est-ce que je me suis lissé les cheveux?
Parce que le cheveux crépus demande de l’entretien quotidien (tresses ou vanilles le soir sont impératives). Parce que je ne voulais pas prendre ce temps-là matin et soir – Yo! le sommeil c’est sacré. Parce que ces cheveux-là font ce qu’ils veulent et je voulais avoir le contrôle sur mon apparence! Les cheveux lisses me paraissent plus malléable et demande moins de temps.
Pourquoi est-ce que je ne me couperais pas les cheveux?
Iiiiiiiich! Mais on verrait vraiment voir mon visage non?! Et si finalement je n’aimais pas? Et si mon mari me trouvait moche? Et si on me trouvait moins pro’ au travail? C‘est en répondant à ces questions (et en regardant beaucoup de photos de TWA2 très réussies) que j’ai pris ma décision : I’m gonna get my tinnie winnie afro!
Voici les conclusions auxquelles je suis arrivée
1) Parce que j’ai décidé d’accepter ma face. ”God gave me that face so I’m gonna rock it every day of my life” puisque je n’ai pas le choix J. Et si jamais je n’étais pas fan du résultat, une PERRUQUE ferait très bien l’affaire – Ouai, je porte parfois des perruques et c’est vachement cool de pouvoir changer de look sans trop se faire chier!
2) Mon mari m’a dit qu’il m’aimerait peu importe ma coupe et même si c’est un homme j’ai décidé de le croire!
3) Je suis en CDI bro’ si je me faisais virer pour port de cheveux court, Primo : Je n’aurais rien perdu Deusio : Je me ferai un paquet de tunes en les attaquant pour discrimination. C’est le Québec ici, on rit pas avec ces choses-là!
En bref j’ai décidé de prendre soin de mes cheveux autant que je prends soins du reste de mon corps. J’ai décidé de m’assumer telle que je suis en portant mes cheveux courts, tressés, lissés ou protégé par une wig quand ça me chante. SURTOUT, j’ai décidé d’en parler pour dédramatiser et informer.
Et si les stars montraient l’exemple?
Même si chacune d’entre nous devrait faire son propre cheminement, une meilleure représentation de femmes noires arborant des cheveux afro en bonne santé aiderait la cause. Car je suis persuadée que si on voyait davantage de Lupita Nyongo dans les médias il y aurait plus de femmes afro qui saurez apprécier leur chevelure.
Crédits photos et images : Affiche du film Nappily ever after – Netflix official website Le petit manuel du cheveu crépu, Nathalie Avomo Essono Natacha Nze Ndong, 2016 Illustrations par Nicholle Kobi
Si cet article vous a plus, suivez-moi sur ma page instagram : @chelle_stories, je partage mes aventures d’immigrantes à Montréal et mon point de vue sur divers sujets de Pop culture afro.
Michelle Camara
Auteure
Française née d’une mère guinéenne et d’un père béninois, Michelle est une passionnée d’échanges interculturels et une amoureuse des mots. Son intérêt pour le voyage et l’écriture l’ont mené à suivre des études et un début de carrière internationales qui l’ont conduite à Paris, Montréal, Lima ou encore Kuala Lumpur. Fière de ses origines et de son parcours Michelle veut promouvoir une africanité rénovée et sans limite. Pour elle, Sayaspora est un moyen de partager son afro-enthousiasme sous toutes ses formes.